Je suis un peu beaucoup en retard! Moi qui me faisait une joie de participer à ce topic! Je présente du coup mon petit texte, en espérant que d'autre suiveront. Je préviens tout de suite qu'il faut un minimum connaître l'univers de ma gardienne pour saisir certaine choses. Pour les autres, faudra attendre que ma fiction sorte. J'ai écrit ce texte en me disant qu'il pourrait parfaitement intégrée cette dernière un jour, peut-être. En tout cas, bonne lecture.
Une nouvelle Barde
Une nouvelle Barde
Cayline ressortie de la bibliothèque, quelque peu inquiète du résultat qui allait tomber. Keroshane lui avait posé les questions de son test, une par une et elle avait répondu, comme le lui avait demandé le faerie, sans réfléchir. Les résultats seraient annoncés dans la soirée. En attendant, chaque nouvelle recrue passait le test à la file indienne.
Pour passer le temps, la jeune femme rejoignit Galaad et Cynon avec qui elle avait quitté Aeruisce pour Eel. Les deux anciens soldats n’avaient pas encore tout à fait, passé outre les anciennes convenances qu’ils devaient avoir en compagnie de la jeune femme. Mais ils se montraient amicaux et prévenants avec elle.
Les deux jeunes hommes étaient nonchalamment assis autour d’une table, discutant de façon frivole de la pluie et du beau temps. Ils avaient fait partie des premiers à passer le test, l’attente devait être pour eux insoutenable. Voyant leur ancienne maîtresse arrivée, ils se redressent un peu, mais n’allèrent pas plus loin dans leur geste à la demande de Cayline.
-Alors, ça a été ? Demanda calmement Galaad tandis que la jeune femme prenait place à leur côté.
-Je pense oui. Keroshane a dit qu’il n’y avait pas de mauvaises réponses après tout, répondit-elle en cachant mal son angoisse.
-Je suis certain que vous serez chez les absynthes, confia franchement Cynon en piochant dans une grappe de raisin posé au centre de la table. Je trouve que ça vous irez bien la fonction de laborantine.
-J’espère juste ne pas être chez les obsidiens. J’ai cru comprendre qu’il s’agissait de la garde de combat et je suis une piètre combattante, pour le moment.
-Si jamais vous êtes affectés à cette garde, je viendrai vous tenir compagnie, je suis presque certains d’être affecté chez eux, affirma Galaad avec le sourire.
La jeune femme rendit un sourire calme à son nouveau compagnon. Tout trois passèrent le reste de la journée ensemble. Lorsque la généreuse grappe fut dépourvue de tous ses grains, ils firent le tour complet d’Eel et de son quartier général. Ils n’osèrent pas, pourtant, passer dans le couloir qui menait aux multiples chambres. Les leur seraient attribuées une fois leur affection connue. Le soleil commençait sa descente dans le ciel qui ils revinrent dans le réfectoire où allait se dérouler l’annonce des résultats. Le lieu était empli de nouvelles recrues venues de tout Eldarya, différents chacun par sa culture, son histoire, son physique. Une majorité, cependant, affichait une mine songeuse et angoissée. Cayline n’était pas la seule à appréhender.
Le trio prit place sur une table miraculeusement libre, légèrement sur le côté de la pièce. Ils n’étaient ni tout à fait devant, ni tout à fait derrière. Ils attendirent ce que Cayline crut une éternité avant que la cheffe de la garde, Miiko, se présente en compagnie des autres membres de l’étincelante. À ses côtés, Keroshane tenait un parchemin épais où s’inscrivaient, sans doute, les divers résultats.
Miiko commença un bref discours, rappelant l’importance de la garde au sein d’Eel. Elle rappela également qu’en tant que futurs membres de la garde, chacun serait traité à l’égal de l’autre, peu importante sa place passée dans la hiérarchie. Puis, elle présenta les chefs de gardes :
Nevra, de la garde de l’ombre, Ezarel, de la garde des absynthes et Valkyon, de la garde obsidienne. Chacun leur tour, ils rappelèrent la spécificité de chacune de leur garde. Puis, enfin, Keroshane s’avance et déroula le long parchemin. Il annoncerait les résultats par ordre de passage. Cynon fut le premier des trois à être appelé : il rejoignit la garde obsidienne. Puis ce fut Galaad qui, sans trop de surprise, rejoignit son frère d’armes dans cette même garde. Il fallut encore un peu de temps avant que Cayline n’entende son prénom.
-Cayline Péseithéos est affectée à la garde de l’Ombre.
Comme ses camarades avant elle, la jeune femme se leva et vint prendre un parchemin que tenait son chef de garde dans la main. Ils s’échangèrent un long regard franc. Dans les yeux ambrés de la jeune femme, Nevra pouvait y lire la détermination. Il pensa que c’était déjà que c’était un bon point. Restait à savoir si la fille du seigneur Araxes serait capable de se montrer à la hauteur. D’un petit sourire en coin, il lâcha complètement le parchemin que la jeune femme tenait fermement dans ses mains et lui intima de le lire rapidement.
-Tu devras rapidement prendre ta décision, ajouta-t-il mystérieusement.
Cayline quitta la cantine et préféra s’isoler dans un coin pour lire le contenue de sa missive :
Nouveaux membres de la garde de l’Ombre,
Votre nouvelle confrérie vous félicite d’avoir rejoint ses rangs. Pour autant, ce n’est que le début de votre nouvelle vie. La garde de l’ombre, en effet, compte plusieurs sous-classes. Car, comme vous pouvez vous en douter, les Ombres peuvent être diverses. Dans les jours à venir, vous serez confrontés à diverses épreuves, à la fin de ces épreuves, nous déterminerons si vous appartenez :
-Aux stratèges :
-Les songeurs de la lune, spécialisés dans la tactique
Ou
-Les érudits de la nuit, créateurs de nouveauté.
-Aux traqueurs :
- Les lames obscures, spécialisées dans les attaques surprises
Ou
-Les archers du crépuscule, spécialisés dans la précision et le tir à l’arc.
Ou
-Les traquenuits, spécialisés dans la dissimulation.
-Aux enchanteurs :
-Les charmeurs du crépuscule, spécialisés dans la magie.
Ou
-Les Fascinateur de l’ombre, spécialisés dans la manipulation des âmes.
-Aux veilleurs :
-Les bardes du crépuscule, spécialisés dans l’observation et l’écoute.
Ou
-Les chanteurs de requiem, spécialisé dans la distraction musicale.
Ou
-Les esquisseurs de l’ombre, spécialisé dans la distraction artistique.
Si vous estimez avoir une certaine affinité avec l’une de ses spécialités, merci d’en informer vos formateurs dès le lendemain de la réception de cette missive. Nous nous tenons à votre disposions pour toute autre interrogation.
Les gradés de l’Ombre
Ps : si jamais vous ne vous distinguiez dans aucune de ses spécialités, un nouveau test vous serait proposé. Si la garde de l’Ombre ressort à nouveau, nous serons dans l’obligation de vous exclure de la garde d’Eel jusqu’à ce qu’une de ces spécialités vous soit attribuée et ceux, en accord avec la cheffe de la garde étincelante.
Cayline se sentit blêmir à mesure qu’elle lisait le contenu du parchemin. La fin, particulièrement, l’inquiétait. Et si elle n’arrivait pas à se distinguer dans ces domaines. Elle fit une introspection et ne sut pas quoi choisir parmi ces quatre spécialités. Elle écarta déjà les traqueurs. La belle n’avait jamais eu besoin de tenir une arme jusque-là. Il lui arrivait, parfois, de s’entraîner un peu, aux côtés de la garde d’Aeruisce, mais elle était parfaitement consciente de son piètre niveau. La magie et les charmes n’étaient pas non plus de ses atouts. Quoique… Mais les charmes du corps suffiraient-ils ? Elle ne se sentait pas particulière stratège ni artiste. Sentant l’angoisse monter, elle ferma vivement le parchemin et rejoignit ses deux camarades. Galaad et Cynon avaient la chance de se retrouver dans cette nouvelle aventure, et même si avant cela, la jeune fille ne les avait pas trop connu, elle aurait voulu se retrouver aussi à leur côté pour un peu plus de soutien.
-Alors, dans quelle garde vous ont-ils affecté ? Demanda le jeune Galaad d’un air joyeux et naïf.
-Les tests ont révélé que j’avais quelques affinités avec les Ombres, répondit Cayline avec un doux sourire.
Elle espérait que ses compagnons ne verraient rien de son trouble, mais la jeune femme était visiblement une mauvaise actrice, car tous les deux affichèrent une mine désolée et inquiète.
-Je suis certaine que vous vous en sortirez bien, madame, se voulut rassurant Cynon.
La jeune femme ne préféra rien dire, se contentant de sourire poliment. Elle préféra garder pour elle cette menace qui planait sur elle : celle de repartir d’Aeruisce, celle de se ridiculiser devant sa famille. Le visage de son frère aîné se peigna dans son esprit et, tout aussitôt, une boule d’angoisse s’installa bien confortablement au creux de son estomac.
Ce soir-là, Cayline feignit d’être fatiguée pour échapper à cette soirée qu’avaient prévu les chefs de garde pour souhaiter la bienvenue au nouveau venus. Elle évita même son ami Belruil, préférant la solitude à la compagnie du bellâtre. Plus tôt, dans la journée, on lui avait attribué une chambre, simple mais confortable quoique bien loin du faste d’Aeruisce. Si Cayline arrivait à trouver une place, elle se jurerait de tout décorer comme elle l’entendait pour s’y sentir bien plus à l’aise. En attendant, la jeune femme s’était enfermée dans un cocon inconnu, seule. Et même si elle avait besoin de cette solitude pour mieux réfléchir, elle se sentit mal à l’aise. Rapidement, la chaleur de son foyer lui manqua. Que lui avait-il pris de partir de chez elle, pourquoi avait-elle voulu tracer sa destinée aussi loin d’Aeruisce, de ses parents, de Chryséis, et même d’Altès ? À cet instant, elle aurait tout donné pour un de ses désagréables sarcasmes. Et à mesure qu’elle pensait, l’angoisse qui s’était nichée en elle s’accroissait jusqu’à l’empêcher bientôt de bien respirer et puis, comme pour se défendre, elle fondit en larmes, s’allongea sur ce matelas au confort plus que moyen sur lequel elle était condamnée à dormir jusqu’à nouvel ordre.
Les pleurs la fatiguèrent, l’angoisse s’allégea un peu, mais continua à persister le lendemain. Elle avait rendez-vous dans les caves du quartier général pour un premier entraînement. En chemin, elle croisa certains de ses camarades. La plupart échangeaient quelques mots sur la fête de la veille. Elle avait visiblement été grandiose. Cayline pensa qu’elle aurait peut-être dû s’y rendre.
Quand ils furent arrivés, Nevra se tenait en haut d’une estrade et regardait ses nouvelles recrues de son seul œil valide, sans laisser paraître la moindre émotion. Quand il passa son regard sur Cayline, elle jura qu’il s’était attardé sur elle, mais elle divaguait certainement. Il prononça un discours assez abrégé et présenta les divers formateurs, venus de tous les horizons d’Eel. Puis, chacun leur tour, ils appelèrent plusieurs nouvelles recrues. Quand la jeune femme fut appelée, elle s’avança doucement, luttant pour ne pas courir et faire marche arrière. Cette fois, elle en était certaine, Nevra la regardait. Elle feignit de ne rien voir et se rangea parmi ses camarades de formation. Certains la saluèrent, d’autres l’ignorèrent. Après tout, ici, à Eel, tout le monde, était traité sur un plan d’égalité. Son haut rang importait peu. Maintenant, Cayline devait faire ses preuves autrement.
Les entraînements s’enchaînèrent, et Cayline avait l’impression de ne parvenir à rien. Il fut rapidement, évidemment qu’elle ne brillait pas dans le maniement des armes. Mais elle ne brillait pas non plus dans la discrétion. Elle essayait, bien sûr, et il était évident qu’elle y mettait du cœur, mais chaque fois qu’elle essayait de ne pas faire de bruit, elle trébuchait, éternuait ou tombait. Sa formatrice, une belle créature habile ne savait plus quoi faire pour lui trouver une place. Elle parla de son cas à Nevra et il était certain pour Cayline que son aventure à Eel touchait à sa fin.
-Il y a une réception ce soir, avant que je prenne décision, je voudrais t’y voir un peu, lui avait déclaré Nevra sans en dire plus.
Sans trop de motivation, Cayline accepta les ordres de son supérieur et se prépara à la réception. Étrangement, une fois vêtue de ses plus beaux habits, la jeune femme retrouva un peu confiance en elle. Elle se mira un temps dans son modeste miroir avant de rejoindre les autres au pied du cerisier centenaire où avait lieu les festivités. Elle y retrouva ses deux anciens gardes ainsi que son ami Belruil. Elle ne l’avait pas vu au cours de ses derniers jours, bien trop occupée à suivre les entraînements. L’elfe noir lui demanda quelques nouvelles et comprit bien vite la situation de sa nouvelle amie.
-Je ne pense pas que Nevra envisage de te faire partir. Sous ses airs légers, c’est une personne droite et franche. Ce n’est pas pour rien qu’il est devenu chef de garde.
-Ma formatrice est désespérée, je ne suis clairement bonne à rien, répliqua-t-elle en attrapant un grain de raisin qu’elle tourna distraitement entre ses doigts avant de la mettre dans sa bouche.
-Je n’en suis pas si sûr, répondit l’homme malicieusement.
Cayline lui frappa l’épaule, affichant une mine réprobatrice et amusée.
-En dehors de ça, je veux dire.
-Je ne doute pas de tes capacités physiques et charnelles, ria Belruil, mais je ne parlais pas de ça. Tu devrais te faire plus confiante. Tu es plus talentueuse que tu ne le penses. Tu as bien réussi à convaincre toute une assemblée de vieillard à t’envoyer ici.
-Tu parles des sénateurs, Belruil, pas de vieillard. Un peu de respect pour ces honorables personnes, répliqua Cayline d’un air sérieux.
Mais cet air solennel ne dura que quelques secondes avant de laisser place à un rapide fou rire.
-De quoi parlez-vous ? Demanda une voix suave.
Il s’agissait de celle de Nevra, accompagné de ses deux autres collègues et amis. Chacun tenait entre ses doigts une boisson différente. Nevra tenait un verre de vin raffiné, Valkyon tenait une choppe emplie de bière et Ezarel tenait un petit verre d’hydromel. La naissance du sourire de Cayline disparu aussitôt à mesure que les trois hommes s’approchaient. L’angoisse qu’elle avait endormie jusqu’ici se réveillait doucement.
-Nous parlions de ce qui s’était passé à Aeruisce, répondit vaguement Belruil en portant à ses lèvres un breuvage clair et pétillant.
-Tu ne nous as rien dit à ce sujet, d’ailleurs. C’était comment Aeruisce, pour un elfe noir ? Demanda sournoisement Ezarel, sans se soucier de Cayline.
-J’ai écrit ce qu’il faut savoir sur le rapport. Si ça t’intéresse tellement, demandes à le lire, répliqua sèchement l’interlocuteur.
Le chef des Absynthe se contenta d’un haussement d’épaule avant de porter son vers d’hydromel à ses lèvres.
-Tu devrais en profiter, Ez’, relança Nevra alors qu’un silence pesant s’installait. Il n’y aura bientôt plus d’hydromel.
-Comment ça ? Questionna son camarade curieux.
-Et bien, j’ai entendu dire que quatre pots de miel avaient disparu ces derniers jours. Personne ne sait de qui il s’agit ou alors, personnes n’ose dénoncer le coupable. Mais puisque c’est l’un des ingrédients essentiels pour l’hydromel… Nos bon vieux brasseurs ne pourront plus en faire.
Tandis qu’il parlait, Nevra ne détachait pas son regard de Cayline. Cette dernière lui fit face, attentive aux moindres mots. Lorsqu’il eut fini, elle aperçut un rapide coup de tête de son chef en direction d’Ezarel, si subtil que même ce dernier n’y fit pas attention.
-La seule personne qui serait capable de voler des provisions se serait tu-sais-qui, répliqua l’elfe à la chevelure bleuté.
Ce fut à ce moment-là que Cayline décida d’entrer en action. Ezarel n’avait pas encore posé le moindre coup d’œil sur elle, aussi, dut-elle trouver rapidement une accroche.
-Nous n’avons pas d’hydromel à Aeruisce, commença-t-elle en arrivant à attirer l’attention de l’elfe.
Ce dernier eut l’air surpris de la voir, comme si elle n’avait jamais été là auparavant. Était-elle si transparente que cela ? Elle passa outre cette réflexion en enchaîna avec un sourire poli.
-Je me demande bien quel goût ça a. Est-ce aussi sucré et doux que du miel ? Comment ressortent les notes d’alcools ?
-Et bien, pourquoi ne pas prendre un verre ? Suggéra Ezarel d’un air un peu agacé.
-Je crois, mon vieux, que tu as pris le dernier, intervint Valkyon d’un air désolé.
-Le dernier avant, longtemps, ajouta Nevra d’un ton tragique.
-Dans ce cas…
Et sans laisser Ezarel réagir, Cayline attrapa son verre et le vida d’un trait. Sous le regard médusé de l’ancien propriétaire du verre, la jeune femme prit un temps de réflexion au sujet de ce qu’elle avait goûté puis afficha un sourire satisfait tandis que le chef des Absynthes lui lançait un regard assassin.
-Je comprends mieux votre goût pour cette boisson. Elle est délicieuse !
-J’espère que tu as bien pris le temps de le déguster, ajouta Nevra d’un air amusé.
Du coin de son œil, il regarda Ezarel fulminer tandis que Cayline continuait à minauder. À jouer un rôle qu’il lui avait silencieusement demandé. Il avait eu peur, pendant un temps, que la stratégie ne fonctionne pas, que la jeune femme ne comprenne pas ce qu’il attendait d’elle. Pourtant, malgré sa tension apparente, elle semblait avait compris cette mission mystérieuse. Nevra connaissait déjà le voleur de pots de miel, il manquait simplement quelque chose, un rien, pour que le coupable se désigne.
De son côté, il avait été facile pour Cayline de deviner qu’Ezarel était un elfe quelque peu égoïste et nareux. Le fait qu’il l’ait ignoré prouvait également qu’il portait peu de crédit envers les recrues. Jouer la fillette naïve et maladroite sortie de nulle part lui sembla être le rôle parfait. En ingurgitant le breuvage, il était certain qu’Ezarel allait presque perdre ses moyens. Il fallait ensuite insister un peu sur l’importance qu’avait pu avoir cette gorgée dérobée pour l’elfe bleu.
-Quel dommage que ce « tu-sais-qui » est volé autant de miel, j’aurai bien repris un verre, confia malicieusement Cayline à Belruil.
Son pauvre ami ne semblait pas vraiment comprendre, mais il se laissa porter et s’apitoya également sur ce soudain manque de boisson miellée.
-J’en aurais peut-être aussi goûté.
Cette fois-ci s’en était trop, Ezarel fendit la foule, poing serrer, bousculant un peu trop violemment Cayline qui atterrit dans les bras de Nevra. Ce dernier, l’aida à se remettre droite puis sourit en suivant son camarade.
-Tu as été super, dit-il en lui adressant un clin d’œil.
Le lendemain, quatre pots de miel furent remis dans le garde-manger avec une note mystérieuse qui demandait que de l’hydromel soit à nouveau fabriqué. De son côté, Cayline était convoquée auprès de Nevra. Ce dernier lui avait donné rendez-vous dans le jardin des fontaines. Elle se demanda un court instant si cela n’était pas, plutôt, un rendez-vous galant. Mais l’air solennel du vampire lui confirma rapidement que ce n’était pas le cas. De nouveau, l’angoisse se fit ressentir, les larmes commencèrent doucement à monter. D’autant plus que Nevra resta silencieux un petit temps, prenant le temps de mieux la regarder. Finalement, tandis que Cayline se tendait de plus en plus, le chef des Ombres sourit avec compassion.
-Tu as bien joué ton rôle hier soir. Ezarel t’en voudra pendant un petit temps, mais ce n’est pas bien grave, n’est-ce pas ?
-Je-je pense que non, répondit-elle hésitante.
-Tu sais, lorsqu’Hanna est venue me voir pour parler de ton cas, j’ai cru un très court instant qu’elle avait peut-être raison. Le test d’entrée n’est pas fiable à cent pour cent. Ça arrive qu’il se trompe parfois et je t’avoue avoir été surpris de te voir parmi mes rangs, mais…
Il fit à nouveau une petite pause durant laquelle il tourna autour de la jeune femme, la sondant de haut en bas.
-À mesure des entraînements, j’ai vu toute ta détermination et je me suis dit que c’était impossible que tu ne sois pas une ombre. Tu es malhabile, c’est vrai, et très maladroite avec une arme, mais tout cela s’apprend. Je t’ai simplement confié à la mauvaise formatrice. Hanna brille dans bien des domaines, mais elle ne met pas suffisamment l’accent sur d’autres arts subtils comme ceux des veilleurs.
Il cessa de parler, regardant la jeune femme, droit dans les yeux. Cette dernière était bien moins tendue, pour sûr, mais les larmes n’avaient pas cessé de vouloir monter. Pas de tristesse cette fois, mais peut-être de joie, si son chef de garde prononçait les mots qui lui permettraient peut-être, de rester.
-Tu as joué un rôle parfait hier soir. C’était drôle à voir, mais personne n’a eu à redire quoi que ce soit. Ezarel a fini par avouer et à rendre ses pots de miel sans faire de vague. La seule raison pour laquelle son nom n’a pas été divulgué, c’est que cela risque d’altérer l’image de la garde étincelante. Il aura une petite punition, mais je pense qu’il s’en remettra. Sans toi, il m’aurait fallu agir frontalement et je ne suis pas certain que ça aurait fonctionné.
Un nouveau petit silence. Le vampire se délestait visiblement de la situation et Cayline sentait son cœur battre de plus en plus vite.
-C’est donc avec une grande joie que je t’annonce que tu fais partie des Ombres. Tu seras l’une de nos rares bardes du crépuscule, Cayline Péseithéos.
La joie se libéra. Enivrée par l’euphorie, la jeune femme se jeta dans les bras de son supérieur, laissant enfin ses larmes débordées. Elle le remercia, mille fois tandis que Nevra riait aux éclats. Cette recrue promettait d’être amusante, pour sûr. Il ne regretterait pas son choix, il en était certain.